{Texte} Le Maçon

Je suis maçon. Je monte des murs. Briques ou agglos, truelle et mortier. Des murs, rustiques mais solides, des murs pour cloisonner, protéger. Je les voudrais les plus épais possibles et hauts, très hauts, infranchissables. Les cloisons, c’est mon obsession. Les boîtes aussi. J’ai plusieurs boîtes. Je les choisis d’acier ou de fer pour que rien n’en sorte jamais. Une boîte par tristesse passée. J’y … Continuer de lire {Texte} Le Maçon

{Texte} Pour nous

Pour nous qui oublions de boire, de manger, nous qui sommes rappelés à l’ordre par nos corps négligés, déchirés; pour nous les ventres vides, qui réchauffons pourtant nos cœurs morts dans les pots de nutella, paquets de granola échoués au pied du lit, bols de céréales avalés sur l’oreiller, bruits du ventre un moment étouffés; pour nous qui ne trouvons la paix que dans le … Continuer de lire {Texte} Pour nous

{Texte} Les Hortensias

Je ne regarde pas la maison, les hortensias. Je préfère me dire les rosiers, les pommiers sont toujours là, ils savent les tailler tout comme moi. Je n’imagine pas l’escalier de bois qui se déroule dans l’immensité du jour qui baigne la grande pièce. J’ignore ce qui me traverse. Ce cœur jadis mort qui se sert, les bras écorchés par les ronces, les premiers pas … Continuer de lire {Texte} Les Hortensias

{Texte} L’Aveugle

Il ne voulait pas d’elle. Du moins pas tout le temps. Par intérim ou à temps partiel, en tous cas sans contrat aucun et, quand ça lui chantait lui. Si elle se montrait tendre, affectueuse, impatiente, insistante ou attentiste, irrémédiablement il reprenait ses distances. En revanche, si son silence à elle s’étirait au fil de trop longues nuits de solitude pesante, alors il se rappelait … Continuer de lire {Texte} L’Aveugle

{Texte} Les corps qui parlent

Mars, traverser les mois comme on traverse un champ de bataille, des ruines. Survivre comme il est possible de survivre, lorsqu’on n’est plus rien, ni personne, ou juste un corps. Un corps qui s’écroule. Je suis la femme morte dans ce corps-là. Un corps qui lâche, usé, à bout. Un corps malade et douloureux, fiévreux qui crache l’esprit très loin en ricochets. Un corps fou, … Continuer de lire {Texte} Les corps qui parlent

{Texte} La Femme Confettis

J’ai le teint papier, papier recyclé, le seuil du regard violet, j’ai les joues creuses, je les ai tant grignotées. Mes pantalons sont trop grands, tout comme mon cœur et je crois, il ne reste plus grand chose, plus grand chose à y mettre tu vois. Dans les bassins j’épuise mon corps, sur les tapis mécaniques, je cours, je cours encore; je m’affame à ne … Continuer de lire {Texte} La Femme Confettis

{Texte} Divorce

Un appareil à gaufres, Un ordinateur, Une bibliothèque, Un faitout – celui de ma grand-mère, Une couette, des draps, Un gratin de pommes de terre –  recette de famille, Un chanteur et sa guitare, Mes hortensias, Lens, Lille, Arras, Mes mots devant le Maire, Bayeux, Mon conte de fée, Ma vision de l’amour, Mes plus vertes années, Mon ventre rond puis découpé, Celle qui suit, … Continuer de lire {Texte} Divorce

{Texte} Le goût des choses

Rosalie aimait manger et il faut le dire, la nourriture le lui rendait bien. Elle était de ces femmes que l’on cataloguait d’un seul regard dans la catégorie « très très pulpeuse ». Une poitrine nourricière et lourde, des fesses pleines et rondes, des cuisses qui ne pouvaient que se frotter l’une à l’autre à chaque pas, une ceinture de chair irréductible qui chevauchait le haut de … Continuer de lire {Texte} Le goût des choses

{Texte} Exorcisme

Un soir gare de Bayeux, deux baskets rouges, un pull camionneur vert, une chambre petite, un, deux baisers derrière l’épaule, un dîner au restaurant, un verre. Un départ, un train. La distance, l’absence, le manque intenable, la route seule, un village paumé, une grand’ place, une nouvelle famille. Arras, Lens, Lille. Les kilomètres à chaque congé. Arromanches, les plages du débarquement, les coquelicots rouges, les … Continuer de lire {Texte} Exorcisme

{Texte} Ancrages

Un phare. Toujours le même. Un ancrage. Goury. La pluie, une amie, un refuge, un port, très petit, très petit. Racine. La famille, racines. Un tatouage, un talisman. Sous la peau, une cicatrice en quelque sorte. Un encrage. Une constellation, les voiles, celles que tu as prises. Ma blessure. La lettre N. Bleue. Du bleu myosotis Vergissmeinnicht. Oubliée pourtant. Couleurs passées. Amours lassés. Le N, … Continuer de lire {Texte} Ancrages