J’ai
le teint papier,
papier recyclé,
le seuil du regard violet, j’ai
les joues creuses,
je les ai tant grignotées.
Mes pantalons sont trop grands,
tout comme mon cœur et je crois,
il ne reste plus grand chose,
plus grand chose à y mettre tu vois.
Dans les bassins j’épuise mon corps,
sur les tapis mécaniques,
je cours, je cours encore;
je m’affame à ne plus rien ressentir,
ni faim, ni soif, ni joie,
je n’y ai plus droit.
J’ai le teint papier,
papier-mâché tu sais,
et l’esprit usé, et sec de mots,
le ventre plein de colère fumante,
de rancœur empoisonnante.
Voilà puisque tu m’en parles,
puisque que tu me le demandes,
voilà ce que j’ai,
j’ai le vide en moi
et sans doute serait-il temps
de le traverser plutôt
que de le remplir vainement.
Je ne suis plus, tout est dit là,
plus qu’une femme qui court,
sur le tapis de sa vie éparse,
et qui évite de traverser les ruines
de tous ces jours noyés;
je suis celle tu l’as dit,
qui ne pleure pas assez.
Je suis la femme qui court,
la fragmentée, la bombe explosée,
la toute bancale au teint,
au corps de papier,
papier recyclé,
femme-confettis, coeur-poudrier,
je suis celle qui a froid,
qui aimerait fuir mais qui ne peut pas,
aller vers elle-même, le cœur en avant,
pour retrouver ses rêves bousillés,
leur fondant.
Il faudrait…
Il faudrait tu vois,
continuer à boire
des infusions le soir;
il faudrait laisser
le crémant perdre ses bulles
dans le bas du frigo;
il faudrait dîner encore
de dattes et de fromage blanc,
renoncer aux hommes et prendre le temps,
il faudrait se poser,
observer ce grand vide,
la guerre, la colère, le chagrin,
en prendre la mesure,
vêtir enfin le noir,
regarder la rose,
donner au chat parfois
une caresse ou trois,
il faudrait juste tu vois,
s’autoriser
à être cette femme-là.
J’ajouté une perle supplémentaires à ce collier élogieux…
Tu tiens là un de tes plus beaux textes.
Puisses-tu, dans un futur que je te souhaite le proche possible, le relire comme nous la voyons nous maintenant, avec les yeux de celle/celui qui distingue l’extrême et ambiguë beauté du profondément sombre.
Merci pour le partage.
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un de mes plus beaux textes ? Carrément ? Oh ben merci… Ton message est magnifique et m’a énormément émue Wic. Bisous
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Comme pour ton « Divorce », je suis admirative, réussir à rendre belle une telle tristesse relève de l’Art avec un grand A. Je suis loin de pouvoir exprimer aussi bien ce que je ressens, d’ailleurs j’en perds (encore!) les mots…mais j’ai dans l’idée que ton blog va devenir mon (très) attendu rendez-vous du dimanche soir 😉 !!
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Super ! Je serai vraiment honorée que tu suives mon blog 🙂 je suis très étonnée de lire un tel commentaire… Je crache les mots d’un seul jet sans forcément travailler mes textes, ils sont très brut et ne me semblent pas si exceptionnels, mais merci j’accueille avec plaisir ton compliment. Bise
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je suis éperdue d’admiration pour ce texte ! Faut-il donc tomber, toucher le fond, être brisée en milliers de morceaux et les rechercher tous, les réagencer dans le noir et créer, se créer, être…
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Oh… Janine..
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